Vedette

patate (n. f.)
[patat]

Définition

Pomme de terre; plante qui produit ce légume.
Champ, pièce, lot, carré, rang de patates. Minot, boisseau de patates. Une poche, un sac, un 10 livres de patates. Pochetée de patates. Caveau, cave à patates. Patate germée. Semer, renchausser, arracher, rentrer les patates. Éplucher, peler des patates. Piler les patates. Patate crue. Une assiettée de patates. Salade de patates. (En composition). Patate de semence. Patate rouge, rose, verte, blanche. Patate hâtive, d'avance, de quarante jours.
[État des données: avancé]

Variante(s) graphique(s)

petate, pétate, pataque, pétaque (souvent, d'après des prononciations populaires, v. Étymologie/historique)
Citation(s) Référence(s)
On peut dire qu'il n'y a pas de repas au Canada sans pommes de terre ou «patates,» qui est le seul nom sous lequel on les connaît dans les campagnes; on les préfère généralement au pain, dont la confection laisse du reste beaucoup à désirer.
1875, Ch.-H.-Ph. Gauldrée-Boilleau, «Paysan de Saint-Irénée de Charlevoix en 1861 et 1862», dans P. Savard (éd.), Paysans et ouvriers québécois d'autrefois, 1968, p. 34.
[études scientifiques]
Excusez, mes amis, si j'appelle pomme de terre, ce que, entre cultivateurs, nous sommes tous convenus d'appeler patates. C'est que, voyez-vous, écrire et parler c'est bien différent : les paroles passent mais les écrits restent. Dans cent ans d'ici – qui sait ? peut-être dans beaucoup moins! – quelqu'un qui nous lirait pourrait bien ne point nous comprendre, ou, tout au moins, nous taxer d'ignorance, si nous ne donnions pas aux choses leurs noms propres.
1877, Le Journal d'agriculture, Montréal, février, p.12.
[presse, journaux, périodiques]
L'année suivante, je l'ai revu chez lui, dans son fief de Placide. Il piochait à petits coups quelques patates au pied d'une grosse roche.
1943, F.-A. Savard, L'abatis, p. 110.
[littérature]
Les mains de sa tante retournent une patate, le couteau glisse rapidement sous la pelure qui se déroule dans la terrine à moitié remplie; rien ne se passe.
1983, A. Poissant, J'avais quatorze ans, p. 26.
[littérature]
C'est qu'il a l'air de vraiment m'aimer, l'animal, pensa Juliette en s'éloignant dans le corridor. [...] Mais qu'est-ce qu'il peut bien me trouver, pour l'amour ? se demanda-t-elle en posant un regard attristé sur sa poitrine énorme qui ballottait comme une poche de patates sur l'épaule d'un épicier.
1989, Y. Beauchemin, Juliette Pomerleau, p. 578.
[littérature]

Origine

Maintien d'un sens parlers régionaux de France

Historique

Depuis 1764 (dans un texte traduit de l'anglais : [...] ils ne payeront pas à l'avenir la dime des patates au Clergé [...], dans La Gazette de Québec, 29 nov., p. 1); attesté régulièrement depuis. Héritage de France. Le mot est relevé dans les dictionnaires français au sens de «pomme de terre» depuis Enc 1765 qui rend compte des multiples noms que reçoit alors ce légume (t. 13, p. 4, article qui a pour titre pomme de terre, topinambour, batate, truffe blanche, truffe rouge et qui ne traite que de la pomme de terre); GrVoc 1768 (s.v. batate et patate) confirme que «cet aliment est aujourd'hui très-commun» et précise que l'appellation qui domine en France est celle de pomme de terre (v. aussi FEW arawak batata 20, 57b, qui signale l'emploi de patate au sens de «pomme de terre» depuis 1769 en français, mais dès 1760 dans un parler français de Bretagne). On peut cependant estimer que patate « pomme de terre» est déjà chez Fur 1727 qui, traitant de la patate douce, la confond avec la pomme de terre dans le passage suivant (noter l'allusion à l'Irlande) : «Les patates sont fort communes en Irlande, & les habitans en ont toûjours fait grand usage. On les trouve assez communément aussi en Angleterre, dans les Païs-Bas, & ailleurs.» Plusieurs auteurs évoquent en effet la confusion qui existe en France, au XVIIIe s., entre la patate douce, la pomme de terre et le topinambour (v. EncSuppl 1776, t. 4, p. 473b et 475b; BrunotHLF 6, p. 292, qui cite Parmentier; v. aussi Besch 1847-1892 : «[Patate] s'est dit quelquefois improprement de la pomme de terre ou du topinambour»), confusion qui est à la source de la diffusion de patate au sens de «pomme de terre» dans diverses régions de France (surtout dans l'ouest du pays, des Landes jusqu'en Normandie, v. ALF 1057), sans doute avant le milieu du XVIIIe s. si l'on prend en compte l'histoire du mot au Québec. En effet, bien que la culture de la pomme de terre ne s'y soit développée qu'avec l'arrivée des Anglais, il ne fait pas de doute que le mot patate était déjà connu au sens de « pomme de terre» sous le Régime français. On trouve en effet, dès 1779, des variantes avec [k] final (pétaque, Neuville, ANQQ, gr. B. Planté, 19 août; aussi pactaque en 1781, pataque en 1785; v. JunPron 197-198) qui ne peuvent s'expliquer que par une influence directe des parlers de France, influence qui n'a pu s'exercer qu'avant la Conquête de 1760 (cp. pataque dans le Poitou, dans le Centre et en Wallonie, v. FEW 20, 58a, ALF 1057; petaque dans le Poitou, v. MinVienne-2; aussi patraque, pétraque, etc. dans l'Ouest et dans l'Est, d'après FEW id.; ces variantes avec [k] final sont probablement issues d'abord d'une dissimilation de t - t en t - k, puis ont pu être confondues avec le mot patraque, v. patate#2); de même, la variante petate est attestée dans le Poitou (v. RézOuest-2, s.v. petatou). L'ensemble de ces données concernant l'histoire de patate «pomme de terre» invite à revoir l'hypothèse de RobHist qui, tenant pour acquis que cet emploi est attesté d'abord au Québec (en 1765), l'explique par l'influence de l'anglais potato (sur ce point, v. JunLex 206 et PoirAngl 58-59). Il est cependant possible que l'anglais potato ait favorisé au Québec la suprématie de patate; pomme de terre y est également bien attesté depuis le début du XIXe s., mais le mot s'était appliqué antérieurement à diverses racines, ce qui a pu contribuer à l'émergence de patate à partir des années 1760 pour désigner le légume dont la culture commençait à s'implanter.

Étymon du FEW

batata

Français de référence

Remarque(s)
1. Le mot pomme de terre est également en usage au Québec depuis longtemps (v. Étymologie/historique), mais il demeure moins usuel que patate et s'emploie surtout dans la langue soignée. 2. Patate «pomme de terre» est moins courant en France et est perçu comme très familier.
Mot particulier
Emploi particulier par son statut (registre d'emploi, domaine d'emploi, fréquence relative ou connotation).
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