Vedette

entaille (n. f.)
[ãtɑj]

Définition

(Dans le voc. de l'acériculture). Ancienn., incision profonde que l'on faisait à la hache ou à la gouge dans un érable pour en recueillir l'eau sucrée. – (Par ext.). Mod. Petit trou peu profond que l'on perce à l'aide d'une mèche, dans lequel on insère un conduit servant à l'écoulement de l'eau d'érable.
[État des données: avancé]
Citation(s) Référence(s)
[...] l'Erabe [...] a la séve differente de tous les autres [arbres], on en fait une boisson tres-agreable à boire, de la couleur de vin d'Espagne, mais non si bonne; [...] pour en avoir au Printemps & l'Automne que l'arbre est en seve, l'on fait une entaille profonde d'environ un demy pied, un peu enfoncée au milieu pour recevoir l'eau, cette entaille a de hauteur environ un pied, & à peu prés la mesme largeur; au dessous de l'entaille à cinq ou six doigts on fait un trou avec un ville-brequin ou foiret, qui va répondre au milieu de l'entaille où tombe l'eau : on met un tuyau de plume ou deux bout à bout si un n'est assez long, dont le bout d'en bas répond en quelque vaisseau pour recevoir l'eau [...].
1672, N. Denys, Description geographique et historique des costes de l'Amerique septentrionale, t. 2, p. 316-317.
[archives et textes anciens]
C'est quelque chose de prodigieux que de voir la quantité d'eau sucrée que fournit chaque Erable sans en etre endommagé, et s'il y a quelque chose qui luy fasse tort, ce ne peut etre que les grandes et frequentes entailles qu'on y fait. Il y a des Erables qui fournissent jusqu'à une barrique d'eau sucrée.
1749, J.-Fr. Gaultier, ms. «Description de plusieurs plantes du Canada», ANQQ, fos 253-254.
[archives et textes anciens]
Jean Rivard, armé de sa hache, pratiquait une légère entaille dans l'écorce et l'aubier de l'arbre, à trois ou quatre pieds du sol, et Pierre, armé de sa gouge, fichait de suite au-dessous de l'entaille la petite goudrelle de bois, de manière à ce qu'elle pût recevoir l'eau sucrée suintant de l'arbre et la laisser tomber goutte à goutte dans l'auge placé directement au-dessous.
1862, A. Gérin-Lajoie, «Jean Rivard, le défricheur canadien», dans Les Soirées canadiennes, vol. 2, p. 128.
[littérature]
On croyait jadis que plus on faisait l'entaille grande et profonde, plus on retirait de séve [sic], c'est pourquoi, on faisait une grande entaille à la hâche [sic] dans le pied de l'arbre; plus tard, on s'est servi d'une tarière de deux pouces, et maintenant, on trouve qu'une mèche de trois lignes ou sept seizième est suffisante.
1928, L'Abeille et l'érable, sept., p. 123.
[presse, journaux, périodiques]
A la suite de nombreuses expériences et observations faites par les acériculteurs et par les spécialistes en la matière, il est prouvé que le chalumeau joue un rôle de première importance dans l'exploitation sucrière; il a pour fin de canaliser la sève de l'entaille au seau.
1952, J. R. Méthot et N. Rompré, L'érable à sucre du Québec, p. 26.
[études scientifiques]

Origine

Innovation sémantique français de référence

Historique

Depuis 1672 (Denys). Découle, par spécialisation, du sens de «coupure (dans une pierre, une pièce de bois) avec enlèvement de parties», qu'a le mot en français depuis le XVIIe s. (v. FEW taliare 13, 48). Le passage du sens ancien d'«incision profonde» au sens moderne de «petit trou» résulte d'un changement dans la technique d'extraction de l'eau sucrée : depuis le XVIIe s., on avait l'habitude de faire une incision large et profonde dans l'écorce des érables à l'aide d'une hache, mais on a commencé à abandonner cette pratique dommageable au cours de la seconde moitié du XIXe s. pour ne plus faire qu'un petit trou avec une mèche. Le mot entaille a connu une spécialisation semblable en France au XIXe s., dans le vocabulaire de l'arboriculture, prenant le sens d'«incision pratiquée sur un arbre afin d'en extraire la sève» (v. TLF et GLLF, dans un exemple de Gautier; v. aussi Robert 1985, dans l'exemple Entaille pratiquée sur un arbre). Cette évolution est parallèle à celle qui s'est produite au Québec deux siècles auparavant; en outre, dans l'usage français, le mot n'est pas associé comme au Québec à un arbre en particulier.

Étymon du FEW

taliare

Français de référence

Réalité propre
Emploi qui réfère à une réalité propre au pays ou à la région de la variété de français, ou qui en provient.
QU: 3205