Vedette

motoneige (n. f.)
[mɔtonɜʒ]

Définition

Petit véhicule motorisé, monté sur chenille et muni à l'avant de skis manœuvrés par un guidon, qu'on enfourche comme une moto pour se déplacer sur la neige.
Chemin, sentier de motoneige. L'industrie, le marché de la motoneige.
[État des données: avancé]

Variante(s) graphique(s)

A d'abord été orthographié moto-neige.
Citation(s) Référence(s)
(Pour la variante moto-neige). L'extraordinaire invention de la moto-neige figure certainement parmi les réalisations les plus spectaculaires du monde du froid après la conquête des pôles et la mise au point des aliments surgelés. La moto-neige est née au Québec il y a dix ans cet hiver. Son apparition était entourée d'un avenir imprévisible.
1968, Le Soleil, 26 déc., p. 5.
[presse, journaux, périodiques]
(Pour la variante moto-neige). J'ai visité Povungnituk à vingt ans d'intervalle. Là où j'avais vu la première fois un magasin et deux tentes, se dresse maintenant un village d'une centaine de maisons [...]. L'hiver, la moto-neige remplace de plus en plus l'ancien kométik tiré par les chiens.
1968, J. Rousseau, dans Les Cahiers des Dix, no 33, p. 64.
[études scientifiques]
Les sapins lourds de neige semblent s'enfoncer dans la terre froide. Déjà les rivières gelées deviennent des routes pour les motoneiges. Les hommes du pays ont inventé ces bruits pour peupler leur hiver sec.
1976, J. Garneau, La Mornifle, p. 94.
[littérature]
Il y a aussi une certaine irritation à sentir que nous avons tant de mal à nous comprendre entre nous qui partageons la même langue. Nous Québécois sommes les inventeurs de ce véhicule que nous avons appelé «motoneige» après moultes [sic] réunions, consultations, etc. Les autres parties de la francophonie ont réagi très diversement, et à l'invention et à son appellation. [...] Quant à son nom, [...] il fut transformé en scooter-des-neiges, en luge mécanique, en moto-luge, en traîneau mécanique, et je ne sais quoi, alors que nous les inventeurs, Armand Bombardier et compagnie, l'avions appelé «motoneige».
1980, H. Bergeron, dans RCDire, vol. 12, no 3, p. 4.
[études scientifiques]
Johnny Sam Annanack, chasseur [inuit] de métier, parcourt 39 000 km chaque hiver en motoneige. L'an dernier, il partait en expédition avec la mission de faire l'essai de la première motoneige conçue spécialement pour le Grand Nord. Conclusion : mis à part les skis trop courts pour la neige molle et les grilles du porte-bagages trop basses, la Samak a passé le test. D'ici peu, Johnny Sam pourra commander ce nouvel outil de chasse modifié selon ses recommandations.
1988, L'Actualité, avril, p. 13.
[presse, journaux, périodiques]
C'est la nouvelle vocation de la motoneige : la conquête des grands espaces. L'hiver, la forêt ne dort plus. De la baie James à la Gaspésie, quand les chemins forestiers sont recouverts de neige, que les lacs sont gelés dur et que l'accès au bois paraît impossible, un réseau de voies de communication parallèle sort de nulle part et traverse le Québec.
1992, L'Actualité, 1er mai, p. 38.
[presse, journaux, périodiques]
On est en plein bois. On suit les repères de l'ancien sentier de motoneige. Il mène à un gazouillement de plus en plus profond, percé de plus en plus fort par le cri des geais.
1994, R. Ducharme, Va savoir, p. 166.
[littérature]
Il existe deux conceptions du plein air diamétralement opposées. La première consiste à utiliser l'espace sauvage comme terrain de jeu. Il implique des moyens mécaniques pour maximiser son plaisir (hors-bord, motoneiges, quatre-roues, ski alpin, etc.) et donner à leur propriétaire l'impression de domestiquer la nature. [...]. La seconde conception implique le respect de la nature. Il s'agit essentiellement d'activités non polluantes et non agressantes envers la nature (canot, vélo, marche, pêche, etc.). Poussée au maximum, cette façon de profiter du plein air devient la philosophie du «no trace» où aucune empreinte de son passage ne doit être laissée.
2003, Le Devoir, 26 août, p. A7.
[presse, journaux, périodiques]

Synonyme(s)

Origine

Innovation lexématique, syntagmatique, phraséologique français de référence

Historique

Depuis 1968. Création québécoise formée de moto et neige, sur le modèle de autoneige. Au cours des années 1960, la motoneige n'était connue que sous les noms de ski-doo, qui était usuel à l'oral, et autoneige, qui était fréquent dans les écrits et dans des noms d'associations regroupant les motoneigistes. En 1967, le Comité de linguistique de Radio-Canada proposa de traduire ski-doo par motoluge, mot qu'on rencontra occasionnellement par la suite à l'écrit jusque dans les années 1970 (v. RCFiches 190). Pour sa part, à la fin de l'année 1968, l'OLF opta pour l'utilisation des termes moto-neige (écrit avec un trait d'union, motos-neige au pluriel) et motoluge (v. Cl. Tessier, dans Le Soleil, 27 déc. 1968, p. 9; v. aussi Colpron-1 120, qui témoigne du même choix chez J.-M. Laurence). Des deux termes, le premier s'imposa rapidement – mais avec l'orthographe motoneige – et il reçut un accueil favorable chez la plupart des linguistiques (v. RCFiches 277). Seul, semble-t-il, P. Beaudry estima en 1973 que motoneige ne respectait pas les principes de la formation des mots en français et, conséquemment, il le condamna au profit de scooter des neiges, mot du français de France qui n'est toutefois jamais passé dans la langue commune au Québec (v. La Presse, 5 sept. 1973, p. F12; v. aussi Robert 1985-2001, qui indique, à tort, que scooter des neiges est employé au Québec).

Avis et recommendation(s)

En 1967, le comité de linguistique de Radio-Canada avait proposé motoluge (v. RCFiches 190), lequel est attesté sporadiquement jusqu'au milieu des années 1970.

Français de référence

Remarque(s)
En France, on emploie scooter des neiges.
Réalité propre
Emploi qui réfère à une réalité propre au pays ou à la région de la variété de français, ou qui en provient.

Données encyclopédiques

La motoneige fut créée par l'ingénieur québécois J.-A. Bombardier, qui la lança sur le marché à l'automne 1959, après de nombreuses années de recherche et d'innovation technique consacrées à l'autoneige. Ce lourd véhicule était lui-même employé au Canada depuis les années 1940, mais il était équipé d'un moteur d'automobile dont le poids représentait l'une des difficultés qui retardaient la mise au point d'un petit véhicule à une ou deux places. Ce fut la sortie sur le marché des moteurs à deux temps, à la fois légers et puissants, qui permit enfin à J.-A. Bombardier de réaliser le «Ski-Doo» – nom de marque déposée qu'il avait adopté avant que ne soit créé le terme motoneige –, dont une large chenille de caoutchouc assurait la traction et dont un remarquable système de suspension permettait d'épouser les irrégularités du terrain. Le succès immédiat de la motoneige comme véhicule utilitaire et récréatif entraîna la prospérité de l'entreprise de Bombardier. Au cours des années 1960, faire de la motoneige devint une activité familiale et sociale et donna lieu à la création de nombreux clubs de motoneigistes. Cependant, les dégâts causés à la faune et à la flore, ainsi que les nombreux accidents mortels, obligèrent les provinces canadiennes à adopter au début des années 1970 une législation restreignant la circulation des motoneiges. Le déclin du marché, amorcé vers 1973 et dû, entre autres, à la crise de l'énergie et à la récession économique, fit disparaître la majeure partie des compagnies. Au Canada, seule Bombardier survécut et, à partir de l'année suivante, elle adopta une stratégie de diversification de ses activités qui la conduisit à s'engager dans les domaines du transport ferroviaire, puis de l'aéronautique. En 2003, la multinationale prit la décision de se départir de la division des produits récréatifs, dont une partie a été acquise par la famille de J.-A. Bombardier. – L. Bovet, dans Québec français, hiver 1990, p. 84-85; Commerce, nov. 1969, p. 37-44; L'Encyclopédie du Canada, 1987; R. Lacasse, Joseph-Armand Bombardier, 1988, p. 165-183; L'Actualité, déc. 1971, p. 48-52, et janvier 1974, p. 16-19; Québec Science, février 1973, p. 4-8.
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