Vedette

grafigner (v. trans.)
[ɡʀafiɲe]

Définition

Fam. Égratigner, érafler, écorcher; griffer.
Un chat qui grafigne un enfant. (Emploi pronominal). Se grafigner les bras, les jambes dans les framboises.
[État des données: avancé]

Variante(s) graphique(s)

graffigner (assez fréquent jusqu'aux années 1980); graphigner (plus rarement )

Variante(s) morphologique(s)

égrafigner, égraffigner (vieilli); grafiner (vieux)
Citation(s) Référence(s)
(Absol.). M. le Curé disait-il dans son langage, si mon adversaire me frappe aplomb, je suis mort; si c'est moi qui frappe, il est mort; on ne graffigne pas, nous autres on défonce.
1882, La Gazette de Joliette, 3 février, p. 2.
[presse, journaux, périodiques]
(Absol.). Bien que personne n'aie [sic] jamais vu ce dernier [le diable], on entendait les coups de poing et Tassé sortait de ces luttes hors de lui-même, exténué et couvert de sueurs. Détail intéressant, Tassé recommandait toujours au diable de ne pas se servir de ses griffes: «Frappe du poing à ta guise, mais ne graffigne pas, maudit».
1954, Th. Boucher, dans Contes et légendes des Vieilles Forges, p. 114.
[littérature]
On ne coupait jamais les ongles des nouveau-nés car on craignait de les affaiblir, ou qu'à l'âge adulte, ces derniers aient à souffrir de myopie. Aussi, recouvrait-on plutôt leurs mains d'une petite mitaine: si leurs ongles étaient trop longs, les enfants étaient portés à se «grafigner» le visage.
1979, J.-Ph. Gagnon, Rites et croyances de la naissance à Charlevoix, p. 114 (le mot est celui d'un témoin interrogé en 1971).
[études scientifiques]
(Pour la variante égrafigner). J'comprenais pas, j'comprenais pas pourquoi qu'y disait çà, j'voulais crier, j'me sus débattue, j'voulais partir en courant, me sus mis à l'égrafigner avec mes mains, mais y continuait [...].
1981, M. Laberge, C'était avant la guerre à l'Anse à Gilles, p. 104.
[littérature]

Origine

Maintien d'un lexème, d'un syntagme, d'une expression (avec son sens) français ancien et parlers régionaux de France

Historique

De l'a. nord. krafla «gratter», avec influence des représentants de la famille de égratigner (dont les anciennes variantes gratiner et gratigner) pour le passage de kr- à gr- à l'initiale et pour la suffixation en -iner et -igner (v. FEW a. nord. krafla 16, 350b-352 et 761b). L'orthographe graphigner est consignée dans des dictionnaires aux XVIe et XVIIe s. (v. Estienne 1549, Thierry 1564, Nicot 1606, Poille 1614). – Depuis 1810 (d'après J. Viger, qui précise : «Je crois qu'il y a cette différence entre graffigner et égratigner, que l'égratignure peut se faire avec toute autre chose que les ongles, une épingle par exemple, au lieu que par égrafignure nous n'entendons que la blessure faite avec les ongles», v. VigerBlais 68). Héritage de France. Grafigner est attesté en français depuis le XIIIe s. (notam. en parlant des chats), mais les lexicographes en limitent l'usage à la langue populaire dès le début du XVIIIe, époque où son concurrent égratigner avait déjà commencé à s'imposer dans la région parisienne. Il n'en reste pas moins que grafigner était alors très répandu dans les parlers des régions de France, où il est encore connu (v. FEW 16, 350b, Godefroy, Huguet, Trévoux 1704-1771 'On doute que ce mot soit aujourd'huy en usage, si ce n'est parmi le plus petit peuple', Féraud 1787 s.v. égratigner, Laveaux 1820-1828 'expression populaire', Besch 1847-1892 et Larousse 1960 s.v. graffigner 'pop.', GLLF 'dialect.', Robert 2001 'régional', ALCB 647 et 1036, TavBourg; v. aussi TLF, qui le donne comme 'fam.'). Sa large distribution sur le territoire de la France explique que grafigner soit naturellement passé dans le français des colonies américaines à partir du XVIIe s.; le mot s'est maintenu non seulement dans les français du Québec, de l'Acadie et de la Louisiane (v. par ex. PoirierG, Mass no 1538, DitchyLouis), mais aussi dans les parlers créoles de la Martinique, de la Guadeloupe, d'Haïti et de la Louisiane (v. par ex. GermCréole s.v. grafigné, TelchAnt, FaineCr-2, PelCréole s.v. grafinin(é), ValdCreole s.v. grafiyen). La variante grafiner (1912-1930) a eu cours en ancien français et elle a été relevée dans de nombreux parlers de France (v. FEW 16, 350b; TamChamp s.v. graffiner); encore attestée dans le français et le créole de la Réunion (v. BaggRéun s.v. grafin(é), CarRéun 192, et ChaudRéun 775). Égraf(f)igner, depuis 1880 (Dunn); il est attesté en français depuis le XVe s. (d'abord sous la forme esgrafigner), mais il est donné comme populaire ou régional dès la fin du XVIIIe s. (v. FEW 16, 351a, Féraud 1787 s.v. égratigner, Laveaux 1820-1828, Larousse 1866, DelvArg 1866, EncXXe, Larousse 1953; v. aussi ALCB 647 et 1036, ALCe 506, ALFC 450).

Étymon du FEW

krafla

Bilan métalinguistique

BPFC 10/8, 1912, p. 308 (pour la variante grafiner).

Francophonie

Commentaire(s) intrazone
Relevé en français d'Acadie et de Louisiane (v. par ex. PoirierG, Mass no 1538, DitchyLouis). Relevé aussi en créole de la Louisiane (v. ValdCreole s.v. grafiyen).
Renvoi(s) aux autres zones francophones
Caraïbe : relevé dans les parlers créoles de la Martinique, de la Guadeloupe et d'Haïti (v. par ex. GermCréole s.v. grafigné, TelchAnt, FaineCr-2, PelCréole s.v. grafinin(é)). – océan Indien : La variante grafiner est attestée dans le français et le créole de la Réunion (v. BaggRéun s.v. grafin(é), CarRéun 192, et ChaudRéun 775).
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