Vedette

barbotte (n. f.)
[baʀbɔt]

Définition

Jeu de hasard, fort populaire et pratiqué de façon illégale dans les années 1930-1950, où deux groupes de parieurs, assis de part et d'autre d'une table tenue par un croupier, misent sur le résultat de deux dés qu'on lance.
Table de barbotte. Jouer à la barbotte. Une partie de barbotte. QU_e210
[État des données: avancé]

Variante(s) graphique(s)

barbote (parfois); barboute (rare, dans salle de barboute)
Citation(s) Référence(s)
M. Allbright Langevin, quel est l'endroit de la partie Est qui contient 2 téléphones, un «bookie» [ «comptoir de pari sur course» ], 2 tables de barbotte, qui est un repaire de bandits et qui fonctionne ouvertement depuis longtemps malgré les plaintes réitérées d'un médecin éminent ?
1929, Le Goglu, Montréal, [ 26 ] sept., p. 6.
[presse, journaux, périodiques]
[ ... ] rue St-André, nous trouvâmes une trentaine de personnes. C'est peut-être là, au fond de cette cave infecte, que j'ai le mieux saisi la force de l'habitude chez les joueurs de barbotte. Il fallait vraiment être esclave du jeu pour s'enfermer ainsi dans un tel lieu, avec tous les risques que cela impliquait.
1950, P. Plante, Montréal sous le règne de la pègre, p. 76.
[littérature]
Il faudrait plus de capital à mon patron, et au lieu d'accumuler des fonds, Gélinot cale tous ses profits à la barbote. Il doit des comptes énormes aux fournisseurs d'huile, et c'est à peine si cette semaine il a pu me payer mon salaire.
1951, R. Viau, Au milieu, la montagne, p. 199.
[littérature]
– Émile : [ ... ] j'ai décidé de profiter du temps de la guerre pour faire de l'argent. [ ... ] J'ai vendu des boîtes de beurre pis des coupons de rationnement sur le marché noir. J'avais des bons «tuyaux». – Joseph : Je te vois pas mal dans ça. – Émile : Fallait que je vive, Chrysostôme! J'aurais une p'tite fortune aujourd'hui si j'avais pas tout joué à la «barbotte».
1958, M. Dubé, Un simple soldat, p. 216.
[littérature]
[ ... ] j'éprouve de la vanité à être dans les appartements privés de monsieur Bob où se réunissent les grosses légumes de la ville qui jouent à la barbotte, au chien noir et au poker pendant qu'une fille, évidemment la plus belle et la plus vicieuse du harem de Bob, se fait aller sur tous les bords au sommet d'une espèce de cylindre mobile [ ... ].
1969, V.-L. Beaulieu, La nuitte de Malcomm Hudd, p. 175.
[littérature]
(Pour la variante barboute). Les Juifs auraient-ils des arguments financiers suffisants pour empêcher qu'on les poursuive ? En serait-il de même pour les maisons de désordre qu'on tolère dans l'Ouest de la ville, des bookmakers juifs, des salles de jeu chinoises, des salles de «barboute» juives ?
1930, Le Goglu, Montréal, 27 juin, p. 2; relevé à diverses reprises dans ce journal.
[presse, journaux, périodiques]

Origine

D'origine obscure

Historique

Depuis 1929. D'origine obscure. Webster 1986 relève le mot barbotte (variantes barbooth et barbudi) en anglais américain, en parlant du même jeu de dés, et le rattache au québécois barbotte (le rayonnement de ce mot à partir du Québec est dû à la réputation de «ville ouverte» que Montréal s'était acquise à l'époque un peu partout en Amérique du Nord). D'après ce dictionnaire, le mot québécois serait lui-même issu du turc barbut. Cette explication est reprise par DARE (s.v. barbudi) qui donne un exemple où l'on suggère que ce jeu a été introduit par des immigrants d'origine grecque ou juive; il s'agirait, dans ce cas, d'un emprunt à une langue étrangère par l'intermédiaire de ces immigrants. La variante barboute, relevée à diverses reprises au début des années 1930 dans un journal de Montréal, et l'exemple qui l'illustre donnent du poids à cette hypothèse. Il n'empêche qu'on relève le mot barbotte en français populaire avec les sens de «perquisition», de «fouille d'un malfaiteur avant son incarcération» (signalé depuis 1821) et de «visite sanitaire que doivent subir les prostituées» (v. ColArg, DoillDict, et TLF s.v. barbot(t)e-2). On trouve d'autres mots de la même famille dans le vocabulaire du vol et de la prostitution, comme barbot «fouille en vue de voler; vol» (v. DFNC 1991), «fouille d'un détenu» (v. TLF, s.v. barbot-2, qui relève cet emploi depuis la fin du XIXe s.), barbot, variante de barbeau au sens de «souteneur» (depuis 1886, v. RobHist, s.v. barboter, et FEW barbus 1, 250b). Cette seconde hypothèse ne permet cependant pas de rendre compte du sens principal du mot qui se dit d'abord d'un jeu de dés. Le québécois barbotte est passé en anglais du Canada et des États-Unis (v. ci-dessus et DictCan).

Français de référence

Réalité propre
Emploi qui réfère à une réalité propre au pays ou à la région de la variété de français, ou qui en provient.
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