Vedette

abandon (n. m.)
[abãdɔ̃]

Définition

Ancienne coutume rurale selon laquelle on laissait les bestiaux paître librement à travers la campagne à certaines époques de l'année, en partic. dans des champs débarrassés de leurs récoltes; fait de laisser paître ainsi les bestiaux, de leur rendre accessibles des terres pour qu'ils y paissent librement.
Donner, permettre l'abandon des animaux, des bestiaux. L'abandon des terres, des grèves aux animaux, aux bestiaux. Le temps, la saison de l'abandon.
[État des données: avancé]

Variante(s) phonétique(s)

[ãbãdɔ̃] (vieilli)

Variante(s) morphologique(s)

anbandon (d'après une prononciation vieillie)
Citation(s) Référence(s)
Ordonnance de M. Deschambault permettant l'abandon des bestiaux excepté sur les terres sur lesquelles les Sauvages ont encore leur blé-d'Inde.
1697, Montréal, dans Répertoire des arrêts, édits, mandements, ordonnances et règlements, 1919, p. 50.
[textes administratifs ou officiels]
Sur les plaintes qui nous ont été faites [...] qu'arrivant la saison de l'abandon des bestiaux, depuis les récoltes faites jusqu'aux neiges, s'imaginant que pour lors on n'est plus tenu à aucune garde des bestiaux, et que dans cette pensée ils [les défendeurs] les laissent vaquer de jour et de nuit, sans les retirer sur leur propres champs, ainsi qu'ils y sont obligés pendant l'automne, ce qui peut causer et cause journellement plusieurs accidens, tant pour le trouble fait à la culture et au labourage, qu'aux clôtures des champs, ruptures des portes de maisons et de granges et à la sûreté des personnes.
1727, Québec, dans Complément des ordonnances et jugements des gouverneurs et intendants du Canada, 1856, p. 452.
[textes administratifs ou officiels]
Plusieurs habitans respectables des districts de Québec et de Montréal, aïant représenté que l'usage ou la coutûme de laisser les Bestiaux errer ça et là dans les saisons d'automne et du printems de l'année, connû sous le nom de l'Abandon des Animaux, est injurieuse à l'amélioration et à l'Agriculture [...] il est par ces présentes statué et ordonné [...] que [...] la coutûme [...] sera abolie [...].
1790, La Gazette de Québec, 22 avril, p. 2 (ordonnance).
[presse, journaux, périodiques]

Origine

Maintien d'un sens français ancien et parlers régionaux de France

Historique

De bandon, par suite de l'agglutination de la préposition à dans des locutions telle mettre à bandon «mettre au pouvoir de» (v. NyropGramm-5 1, p. 459, et Robert 1985). La variante anbandon a été relevée en normand (v. FEW a. frq. *ban 15-1, 50a). – Depuis 1697. Héritage de France; emploi relevé en Champagne et en Lorraine (v. Richelet 1732 «Terme dont on se sert dans quelques coutumes», et PiqMeuse 13), qui se rattache lui-même au sens plus général de «liberté, licence» (relevé en français de Thierry 1564 à Monet 1636). La coutume rurale de l'abandon, correspondant en bonne part à ce que l'on nommait vaine pâture et parcours en France (v. Robert 1985, s.v. pâture et parcours), paraît trouver son origine dans le droit féodal selon lequel les seigneurs devaient tolérer que les habitants placés sous leur autorité laissent paître des animaux sur les terres de leur domaine lorsque celles-ci étaient en jachère ou débarrassées de leurs récoltes (v. GrEnc, s.v. pacage).

Étymon du FEW

*ban

Données encyclopédiques

L'abandon, qui remonte à une ancienne coutume de France (v. Étymologie/Historique), a été implanté en Nouvelle-France dès l'établissement des premiers colons. Les récoltes faites, les habitants des campagnes (et même ceux des villes) pouvaient relâcher temporairement la garde de leurs animaux. En ouvrant ou en défaisant les enclos, on leur rendait accessibles sinon toutes les terres environnantes, du moins les prairies naturelles (comme celles qui s'étendaient le long des rivages) et les terres agricoles où croissaient encore les repousses d'herbe après la fauchaison. Vaches, chevaux, moutons, cochons erraient ainsi à la recherche du dernier fourrage vert avant les neiges. Interrompu par l'hiver, l'abandon pouvait reprendre au printemps, de la fonte des neiges jusqu'aux semailles. Toutefois, les nombreux inconvénients et les dégâts que cette coutume causait forcèrent les autorités à la réglementer, puis à l'abolir vers la fin du XVIIIe s. En dépit de cela, l'abandon paraît avoir été pratiqué jusqu'au XXe s., notamment dans des champs appelés bandons qu'on livrait aux animaux avant les semailles ou après les récoltes.
QU: 8