Vedette

denier (n. m.)
[dənje]
Peut être représenté par l'abréviation d. mise en exposant après le chiffre.

Définition

Hist. (Surtout dans les comptes). Depuis la Conquête, la douzième partie du shilling, soit la deux cent quarantième partie de la livre anglaise (ou louis); rare pièce de cette valeur. Abréviation du mot denier (d.) sur un billet de trente sous, papier-monnaie privé, 1848 (Musée de la civilisation, collection Archives nationales du Québec, S1993-02118-000)
5 louis, 12 chelins, 10 deniers. Demi-denier. Rare (Pour faire une distinction nette avec le denier français). Denier sterling.
[État des données: avancé]
Citation(s) Référence(s)
Tous les bouchers et boulangers anglais qui désirent se livrer à ces métiers devront prendre un permis pour ce faire chez le Secrétaire, et quiconque pratiquera ces commerces sans en avoir au préalable obtenu un permis, sera, pour la première offense, condamné à cinq livres d'amende [ ... ]. [ ... ] Le prix du pain du poids requis et bien cuit sera comme suit – Pain blanc... 5 deniers la livre. Pain ordinaire... 4 deniers la livre. (la version anglaise, où l'on trouve pound pour livre, confirme qu'il s'agit de la monnaie de compte anglaise)
1760, proclamation du gouverneur Murray, dans Report of the Public Archives for the Year 1918, 1920, p. 42.
[textes administratifs ou officiels]
Il a été ordonné par les dit Commissaires, que considérant les prix du Bled et Farine et les mauvais chemins au Moulins dans le district et environs de Montréal, le Taux et Assize du pain sera comme suit, sçavoir : Le pain blanc, pesant 4 lb. à six deniers ou douze sols.
1778, La Gazette de Québec, p. 3.
[presse, journaux, périodiques]
[ ... ] le banc No 18, rangée du nord, dans la nef, dans l'Eglise de Saint-Valier, [ ... ] a été par nous marguillier en exercice soussigné, adjugé à la criée [ ... ] pour la somme de seize piastres, trois chelins et quatre deniers courant, la plus haute offerte à l'enchère [ ... ].
1865, Archives de la Fabrique de Saint-Vallier (Bellechasse), livre de comptes 1854-1884, 30 avril.
[archives et textes anciens]
Le système des monnaies de cuivre a été si longtemps dans un si mauvais état qu'on sentit un besoin général de la circulation de centins; le Ministre des Finances pour rencontrer ce besoin du public, a par une circulaire autorisé tous les départements du gouvernement et les officiers de recevoir les monnaies de cuivre légalement autorisées, les sous et les demi-deniers pour des centins et les deniers pour deux centins, et a prié tous les banquiers, marchands et autres de faire de même. Toutes les autres monnaies de cuivre sont illégales.
1870, La Minerve, Montréal, 4 oct., p. [ 2 ].
[presse, journaux, périodiques]
Un Crémazie empilant louis, chelins et deniers derrière son comptoir, un Crémazie riche et replet, avec pignon sur rue et table ouverte aux courtisans, eût-il imprégné ses poèmes d'une mélancolie caractéristique et laissé à la postérité les beaux et douloureux accents du Vieux soldat ou du Drapeau de Carillon ?
1946, S. Marion, dans Le Canada français, vol. 33, p. 391-392.
[littérature]

Commentaires

Attesté de façon épisodique dans la documentation.

Origine

Emprunt d'un sens anglais

Historique

Depuis 1760. Extension sémantique sous l'influence du mot denarius, lequel est employé en anglais dans les comptes comme équivalent de penny depuis le XIVe s., notamment sous la forme de l'abréviation d. (v. OED, s.v. denarius et s.v. d, sens III; v. aussi BDE, s.v. denarius : «The letter d was used in Britain as a symbol of denarius for penny and for pence [ ... ] from 1387 until 1970»); le mot denier lui-même est attesté en anglais avec cette même valeur aux XVIe et XVIIe s. (v. OED, s.v. denier, sens 2). L'appellation denier sterling figure dans les dictionnaires de France depuis le XVIIIe s. en parlant du penny anglais (v. Trévoux 1752, s.v. penny : «C'est ainsi qu'on appelle en Angleterre le denier sterling»; v. aussi Enc, Laveaux 1820 et Besch 1847-1880, s.v. penny). L'emploi du mot denarius en anglais a été signalé par Diderot au XVIIIe s. (v. Enc, s.v. denier; v. aussi RobHist, s.v. penny) et l'usage de l'abréviation d. dans les comptes en anglais est mentionné encore dans Larousse 1982 (s.v. penny).

Français de référence

Équivalent(s)
penny (moins fréquent au Québec)

Données encyclopédiques

Les systèmes monétaires anglais et français découlent d'un même modèle; les valeurs proportionnelles entre les différentes unités de chacun de ces systèmes sont les mêmes (livre/sou/denier d'une part, pound/shilling/penny d'autre part), le denier et le penny valant toujours la deux cent quarantième partie de l'unité principale et la douzième partie de l'unité précédente dans la chaîne. En imposant leur système monétaire aux lendemains de la Conquête, les Anglais décident d'y adjoindre, en établissant des équivalences, les unités du système français qui avait cours jusqu'à cette époque. La valeur de la livre française est ainsi établie à un vingt-quatrième de la livre anglaise (pound), le sol demeurant la vingtième partie de la livre française, comme sous le Régime français. Mais, contrairement à ce qu'on aurait pu s'attendre, le mot denier s'insère dans le nouveau système comme équivalent de l'anglais penny et l'abréviation d. devient courante. Cette situation s'explique par deux causes principales : a) l'appellation denier, désignant le penny, n'était pas inconnue en anglais et l'abréviation d. (pour denarius) y est courante depuis le Moyen Âge dans les comptes (v. Étymologie/Historique); b) en raison de la faible valeur de la monnaie française, le denier français ne valait plus que le un vingt-quatrième du penny anglais, de telle sorte que le mot denier redevenait en pratique disponible (au besoin, on pouvait préciser au moyen de l'appellation denier sterling). L'intrication des appellations françaises et anglaises dans la désignation de la monnaie sous le Régime anglais est bien illustrée par les séries louis, chelin, denier d'une part, et piastre, chelin, denier d'autre part, qui étaient usuelles au XIXe s., même dans les textes officiels (v. un exemple de 1859 s.v. piastre). – R. Sédillot, Toutes les monnaies du monde, 1955, p. 26, 123-124, 307-308, 380; F. Ouellet, Histoire économique et sociale du Québec 1760-1850, 1966, p. 59.
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